167


Retour au Maroc


Au même moment, il me faut tourner sur la gauche pour prendre la direction du centre ville. Malencontreusement, une flaque d'huile sur la chaussée du carrefour fait déraper la voiture dans le virage.
- Whao ! Comme James Bond ! s'exclame-t-il, croyant que je virais brusquement pour aller les retrouver…
Je me surprends à lui répondre :
- Sacré Boubou va ! Tu n'en manqueras pas une…
- De nana ? Hé normal, j'suis pas reporter pour rien, j'ai les yeux partout ! Me répond-t-il…

Ce reportage photos est pour moi l'excuse d'aller retrouver les coins que j'ai aimés ; les décors colorés de vert et de rouge surprenants de beauté ; la couleur du drapeau marocain prend-elle ici tout son sens ? Les souks avec leurs lumières pastelles et leurs mille odeurs… Les souvenirs continuent à affluer, me pressant à renouer contact avec mes anciens amis d'enfance.

C'est aussi le plaisir de retrouver l'accueil chaleureux de ces gens, cette hospitalité si rare dans notre Europe devenue trop moderne et où tout le monde ne semble penser qu'à courir après une vie plus belle d'un lendemain imaginaire.

D'autres voyages conforteront cette amitié retrouvée. Je serai à chaque fois obligé de cacher mon arrivée pendant quelques jours pour ne pas commencer dès le début à répondre à de multiples invitations non pas désagréables, loin de là, mais pour me permettre de prendre un repos précieux avant d'affronter ces repas dignes de l'accueil d'un prince, mais si loin de tout régime, moi qui ai déjà tendance à prendre 10Kg, juste en dévorant des yeux ces plats succulents.

Je fais sans cesse connaissance de nouveaux amis. Cette phrase qui dit : les amis de mes amis… etc., ne sera sans doute jamais aussi vraie dans cette culture de l'hospitalité.


 
168


Retour au Maroc


Lors d'un de ces repas, chez mon amie directrice d'une clinique d'Agadir, je rencontre le Docteur David, un chirurgien franchement sympathique. Je lui exprime mon admiration pour ce métier certainement difficile, mais qui sauve tant de vies. Je lui fais aussi part de ma peur et de mon peu de désir de me retrouver un jour dans un bloc opératoire, de devoir me faire anesthésier…
- Mais ce n'est rien ! S'exclame-t-il étonné.
Voulant me rassurer, il m'invite alors à assister dès le lendemain matin à une opération chirurgicale. Je relève le défi et accepte son invitation, à la fois angoissé mais curieux.

L'atmosphère régnant dans le bloc et mon équipement n'ont rien pour me rassurer. Je me retrouve avec une blouse, mes sur-chaussures, une paire de gants aux mains et un masque sur le nez, devant un patient souffrant d'une appendicite aigue, mais qui me semble finalement bien plus à l'aise que moi. Quelques instants après, endormi, David commence à inciser d'un coup de bistouri, la peau d'une fine ouverture. J'ai soudain très chaud sous mon masque et détourne les yeux pour lutter contre un hypothétique malaise. Je croise les yeux de David qui, sous son masque, à l'air de bien s'amuser devant mon état titubant. Finalement, ce regard me rassure et ne voulant plus perdre la face, je repose définitivement les yeux sur le ventre de notre opéré.
Je ne demanderai, à chaque séjour, qu'à revenir voir d'autres opérations toujours plus sévères. J'y prends goût !

Un jour David me dit :

- Là, notre bonhomme souffre depuis plus d'un mois d'une occlusion intestinale. On va bien voir pourquoi. Je te préviens, on va dégager les intestins avec l'aspirateur et ça risque de ne pas sentir très bon…
- Oh, je m'en fou, grâce à toi je suis ''blindé'' à présent !