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Une si belle vie...
(1ère partie)


Tout se déroule bien dans cette vie de chanteur.... Le succès est complet. Oh, les avatars ne sont pas rares, mais qui s'en plaindrait.

Xyprus partage ma vie, c'est le compagnon idéal qui ne me quitte jamais. Il est d'une intelligence rare qui m'étonne toujours, comme il étonne mon entourage. Je ne lui donne jamais à boire, c'est lui qui me le réclame quand il a soif... Nous arrivons dans une salle de spectacle pour le check-sound, il vient me chercher, je lui demande ce qu'il veut et me prend la manche du blouson dans sa gueule avec délicatesse, semblant me dire «viens par là, suis-moi...». Je lui emboîte le pas... Il m'emmène à une porte que j'ouvre. Un lavabo est là devant moi, j'ouvre le robinet et il boit... Tout simplement !

Il se fait vite des amis dans les spectacles, soulève les mains pour réclamer des caresses. Mais quand je suis sur scène, plus personne n'entre dans la loge, connu ou pas. Il fait son travail. Oh, jamais méchamment, mais il arrive quelques fois que lorsque Nicolas, mon secrétaire, fait le calcul des frais pour un spectacle, je vois sur une ligne «Xyprus, un pantalon = 200 F». C'est une malheureuse victime qui a osé s'aventurer dans la loge en mon absence. Pas de morsure ou de blessure, mais le pantalon déchiré en avertissement...

C'est à cette époque que mon ami Alain, le commandant de bord m'emmène pour prendre des cours de pilotage à Nangis. Xyprus s'assoit à chaque fois à l'arrière de l'avion, semblant tout aussi intéressé que moi, mais plus particulièrement quand il nous arrive de survoler un troupeau de vaches, c'est sa passion !



 
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Une si belle vie...
(1ère partie)


Tout se passe donc bien, sauf mon divorce qui me coûte une petite fortune... Mais ça, c'est une autre histoire.

Depuis quelques temps, je vis avec Véra dans un appartement de Montmartre. Il surplombe tout Paris et de la rotonde où l'on mange, les lumières de la capitale semblent nous offrir un dîner aux chandelles, digne des plus grands rois.

Je viens d'obtenir ma licence et je pars voir ma mère à Aix en Provence avec ce petit avion. Il n'est pas très rapide, mais c'est le tout premier long trajet, tout un symbole. Certains se contentent de faire des vols locaux dans un premier temps, personnellement je mets tout de suite en application ce à quoi un avion doit servir.

Peu de temps après, je refais le même voyage pour un spectacle à Salon de Provence. Ce jour là, le mistral souffle violemment dans la vallée du Rhône. Une aubaine, puisque l'appareil se déplace dans une masse d'air favorable. A sa vitesse propre, il faut ajouter la vitesse du vent qui souffle dans le même sens.

A l'approche d'Orange, je demande une autorisation de transit sur la fréquence radio de la base aérienne. Pas de réponse. Je renouvelle mon appel plusieurs fois, sans résultat. Ne souhaitant pas entrer dans un espace militaire sans autorisation, je me décide d'emprunter le cheminement VFR (tracé virtuel autorisé sans contact radio). Nous sommes assez bas, 1450 pieds (500 m) et une barrière rocheuse se dresse une petite centaine de mettre plus bas. J'ai appris, dans les cours théoriques, que franchir une montagne et se retrouver «sous le vent», présentait un risque de fortes turbulences dues aux rouleaux qu'engendraient les "rabattants", ce qui pouvaient plaquer l'avion au sol, si l'attitude était faible.